8 mars : Sandrine Bachy, une Vision au Féminin du Transport Routier

Parcours Inspirant: Quelles ont été vos motivations pour vous engager dans le secteur du transport et accéder à la présidence de l’Unostra ? Comment avez-vous surmonté les obstacles en tant que femme dans ce domaine ?

A la base je ne me destinais pas à une carrière dans le monde des transports, puisque je faisais des études d’expertise comptable, mais mon époux travaillant dans le domaine du transport m’a fait connaître ce secteur et très vite j’ai passé l’examen pour obtenir l’attestation de capacité transport de marchandises. Examen que j’ai obtenu du premier coup malgré le faible taux de réussite des candidats à cet examen. Nous avons donc créé notre entreprise de transport en 1997. J’ai aussi voulu très vite m’investir auprès de l’UNOSTRA, tout d’abord dans ma région, ce qui m’a permis de rencontrer  nombreux de mes confrères, d’échanger avec eux de nos problématiques et surtout d’être mis au courant au mieux des évolutions de notre secteur. Par la force des choses je me suis également investi au niveau national et je suis devenue présidente nationale de l’UNOSTRA de juin 2017 à janvier 2024.

Il est vrai que dans le secteur du transport les femmes sont peu nombreuses et que la vie ne leur est pas facilité : nous devons sans arrêt et sans relâche prouver que nous méritons notre place et que nous sommes tout à fait capables et compétentes. Nous devons nous affirmer en permanence et souvent taper du poing sur la table afin de nous faire entendre. Mais à force de persévérance nous obtenons une certaine légitimité et un profond respect.

Leadership au Féminin: Selon vous, qu’apporte une femme à une position de leadership dans un secteur traditionnellement dominé par les hommes comme le transport ?

Pour moi les femmes du fait de leurs difficultés à se faire accepter dans ce secteur ne peuvent  diverger et doivent aller directement à l’essentiel. Nous sommes donc beaucoup plus réactives tout en étant beaucoup plus réfléchies. Ce qui nous permet d’affronter les difficultés plus sereinement et de mieux les surmonter tout en trouvant des solutions plus rapidement.

Changements et Évolutions: Depuis votre prise de poste, quels changements majeurs avez-vous observés ou initiés concernant la place des femmes dans le secteur du transport ?

Je n’ai pas la prétention d’avoir initié quoi que ce soit pour les femmes dans ce secteur mais si j’ai contribué à leur démontrer qu’en étant une femme on peut tout à fait diriger une entreprise de transport tout en s’investissant dans la défense de la profession en présidant une organisation syndicale alors j’aurai réussi.

Conseils aux Futures Générations: Quels conseils donneriez-vous aux jeunes femmes aspirant à des carrières dans le secteur du transport ou souhaitant accéder à des postes de direction ?

Le seul conseil que je peux leur donner est d’être tenace et persévérante puis comme on dit « Qui veut peut. »

Équilibre Vie Professionnelle/Vie Personnelle: Comment avez-vous géré l’équilibre entre votre carrière exigeante et votre vie personnelle/familiale ?

Tout est une question d’organisation. Il est bien connu qu’une femme au contraire d’un homme est capable de faire plusieurs choses à la fois. Donc on peut tout à fait mener une carrière professionnelle exigeante tout en ayant une vie personnelle et familiale.

Il ne faut surtout pas culpabiliser vis-à-vis des enfants qui pourraient avoir l’impression d’avoir une mère trop occupée car comme dit la maxime « Quand les parents sont heureux, les enfants sont heureux. » Une femme épanouie dans son travail ne peut être que bénéfice pour sa famille.

Défis Spécifiques aux Femmes: Quels défis spécifiques pensez-vous que les femmes rencontrent dans le secteur du transport et comment peuvent-ils être surmontées ?

Le défi majeur pour une femme est d’être respectée. Les hommes ont énormément de mal à être dirigés par une femme, même encore de nos jours. Par conséquent ils remettent souvent sa parole et ses instructions en doute et essaient de la contrer en voulant démontrer son incompétence. Les femmes doivent être fermes et parfois même autoritaires afin de se faire respecter.

Vision pour l’Avenir: Quelle vision avez-vous pour l’avenir des femmes dans le transport ? Y a-t-il des objectifs spécifiques que vous aimeriez voir atteints ?

Elles ont tout à fait leur place dans le secteur et leur pragmatique est une force. Il va falloir que chacun accepte qu’elles y sont les bienvenues, que chacun se fasse à l’idée qu’elles seront toujours présentes et de plus en plus nombreuses. Que plus personne ne remette en cause leur légitimité dans la profession.

Mentorat et Soutien: Comment le mentorat et le soutien entre femmes peuvent-ils jouer un rôle dans l’avancement des carrières féminines dans le transport ?

Certes un soutien entre femmes peut être utile pour leur avancement dans le secteur mais on peut déjà observer que nous occupons de plus en plus de postes : conductrices mais aussi exploitantes ou dirigeantes. Nous occupons pratiquement tous les postes de la chaîne transport.

Message pour la Journée de la Femme: En tant qu’ancienne présidente de l’Unostra et leader féminine dans le transport, quel message souhaitez-vous transmettre à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes ? 

Malgré de belles avancées le chemin reste long, tout n’est pas parfait pour les femmes. Nous ne pouvons tolérer davantage les différences de rémunération. Comment se fait-il qu’à diplôme égal et à poste égal des écarts de salaires entre les hommes et les femmes subsistent ?  Il faut absolument que de nouvelles femmes nous rejoignent dans la profession afin de respecter la parité et peut-être enfin les écarts de rémunérations disparaîtront. Mais le chemin reste malheureusement long. Quand on sait qu’une femme à diplôme égal et à poste égal travaille gratuitement du 6 novembre au 31 décembre par rapport à un homme, tout secteur d’activité confondu. Ceci n’est plus acceptable. C’est bien beau d’avoir instaurer une journée de la femme en la date du 8 mars (les hommes ont voulu peut-être se donner bonne conscience en instaurant une telle journée en 1977) mais dès à présent les femmes veulent des actes concrets afin que leur reconnaissance aille de soi. Cela ne doit plus être un combat perpétuel, il faut que l’importance de la femme dans notre société soit une évidence.

Paris, le 8 mars 2024